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Le Cercle des Voisins

Informe de l'atteinte à la dignité et aux droits humains que représente l’existence et le fonctionnement du «Centre de Rétention Administrative de Cornebarrieu», défend la libre circulation des personnes et dénonce le système mis en place pour l’expulsion des personnes privées de papiers.

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Fermez les Centres de Rétention !

La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

Solidarite avec Mimmo Lucano

Médiapart | 11 août 2015 | Par migreurop

Dans cette tribune parue dans Libération le 13 juin 2006, Claire Rodier, alors présidente du réseau migreurop, dénonçait une notion qu'on voit réapparaître près de 10 ans plus tard.

Une expression commence à se banaliser dans les médias et chez certains politiciens : c’est celle d’« émigration illégale ». On l’emploie beaucoup depuis quelques jours, à propos de ces Africains qui, par le désert puis par la mer, tentent de traverser l’inconnu pour rejoindre les rivages européens.

La notion d’« émigration illégale » nous alarme, pour les lendemains maléfiques qu’elle paraît annoncer. Elle n’est pas nouvelle puisque déjà Le Monde titrait le 24 juin 2002 : « Les Quinze ne sanctionneront pas les pays d’émigration illégale. » Peu après, le gouvernement marocain promulguait la loi n° 02-03 du 11 novembre 2003 « relative à l’entrée et au séjour des étrangers au Maroc et à l’immigration et l’émigration irrégulières », dont les articles 50 à 52 punissent sévèrement (jusqu’à vingt ans de réclusion) quiconque quitte ou aide à quitter « le territoire marocain d’une façon clandestine ». Et de fait, poussé en cela par l’Union européenne (UE), le Maroc a pris l’habitude de faire la chasse aux sortants - ce qui, on le sait, s’est soldé par une quinzaine de morts par balle lors des événements de Ceuta et Melilla de l’automne 2005.

Aujourd’hui, l’expression « émigration illégale » se propage, transformant le seul fait de prendre la route en un acte répréhensible. Elle vient de recevoir l’aval de la Conférence des ministres de l’intérieur de la Méditerranée occidentale (CIMO), qui s’est tenue à Nice les 11 et 12 mai 2006, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, par un communiqué « saluant les efforts des pays de la rive sud de la Méditerranée pour contenir l’émigration illégale vers l’Europe ». Plus au sud, les autorités sénégalaises viennent d’annoncer qu’elles ont procédé sur leur propre territoire à l’arrestation de plus de 1 500 « candidats à l’émigration clandestine » qui s’apprêtaient à rejoindre les Canaries en pirogue (AFP, 22 mai 2006).

Cependant, ni le concept qui fait de l’émigrant un criminel, ni les pratiques qu’il prétend autoriser n’ont de légitimité au regard d’un texte de 1948, qui engage tous les Etats membres de l’ONU. En effet, l’article 13, alinéa 2 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) énonce : « Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays. » Ce droit a été confirmé par plusieurs textes internationaux à portée contraignante, dont le Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966. Ainsi, seule l’immigration peut ne pas être légale, l’entrée sur le territoire d’un Etat étant soumise à son vouloir souverain. C’est bien sûr par une symétrie fallacieuse que l’idée d’une « émigration illégale » s’est forgée, puisque si aucun pays n’est disposé à accueillir le voyageur, alors celui-ci perd le droit de voyager.

La criminalisation du migrant à la source n’est certes pas nouvelle. Mais elle a été et reste l’apanage des pays s’inspirant du modèle soviétique, où il est naturel de tirer à vue sur l’émigrant, considéré comme un fuyard ; divers régimes autoritaires s’en sont inspirés. La DUDH a pu servir précisément à cela : « illégal » chez lui, l’émigrant devenait un immigrant bienvenu dans le pays d’accueil. Par une ironie habituelle dans l’histoire politique, une même référence à l’illégalité du départ est invoquée maintenant comme un péché contre notre hospitalité. Et les principes juridiques universellement reconnus sont passés à la trappe.

Sur fond d’électoralisme raciste, cette création de vocabulaire cache un marchandage. Du côté de l’UE, l’on entend monnayer ses libéralités, astucieusement baptisées tour à tour « aide à la surveillance des frontières » et « aide au développement ». Du côté des pays dominés, c’est la surenchère à qui sera le meilleur élève d’une UE qui désormais ne cache plus qu’elle distribue ses prébendes à l’aune de leur capacité à endiguer les flux migratoires. Ainsi à Rabat, l’on se plaint que les quarante millions d’euros promis par l’UE à ce titre n’ont toujours pas été versés, en dépit des efforts de la police et de l’armée marocaines pour stopper les flux « illégaux » vers le Nord. Et l’on sait que, si en 2005 la Libye parlait de lâcher deux millions de migrants sur l’Italie, c’était pour obtenir reconnaissance et appuis financiers en Amérique et en Europe - ce qui fut fait. Plus que jamais, la stratégie du tiroir-caisse est appelée à faire florès, et l’on se bouscule aux guichets de l’UE. S’adressant aux Espagnols qui veulent lui renvoyer ses boat people échoués au Canaries, le président du Sénégal, Abdoulaye Wade, clame pour ne pas être en reste : « Qu’ils me les renvoient, mais qu’ils me donnent aussi [de l’argent pour l’irrigation] » (Journal du Dimanche, 21 mai 2006).

En réalité, les gouvernements européens et africains sont en train d’imposer un concept qui n’a aucun fondement juridique, aux seules fins de lutter contre l’immigration illégale. Ce qui inquiète le plus, c’est cette régression annoncée vers un système qui généralise la mise à l’écart des indésirables en recourant un peu partout à leur enfermement : d’un côté le sanctuaire des pays riches, et de l’autre une zone d’où il sera interdit de sortir, et qui s’apparentera à un vaste camp. Et enfin, l’Europe se construit en produisant toujours plus de violence à ses marges. En attendant, dans les pays situés au milieu de ce face à face, un racisme attisé par les pays dominants se développe, notamment à l’égard des migrants d’Afrique noire pris au piège d’une trajectoire migratoire interrompue. La stigmatisation d’une prétendue émigration illégale contribue à renforcer l’arsenal policier des pays qui collaborent, de gré ou de force, aux politiques européennes dont le but est de tenir les étrangers à distance.

Vite dit

06/06/2022 - Archarnement administratif, ca suffit !

« Comment peut-on croire qu'on sera plus heureux en faisant du mal à d'autres ? » (Hervé le Tellier – L'anomalie)

Ce mardi 7 juin 2022, Gideon est convoqué au tribunal judiciaire de Toulouse. Combien de juges a-t-il vu depuis le jour où il a été interpellé au commissariat de Pamiers ?

Au moins 7.

Le 3 mai, ce jeune gabonais de 18 ans, a été placé au centre de rétention de Cornebarrieu pour un vol prévu le 4 mai vers Libreville. Ce placement rendu possible par la loi (Article L 740-1 CESEDA) a été concrétisé par la préfecture de l'Ariège.

Il a refusé d'embarquer car toute sa famille vit en France de manière régulière. Il est scolarisé au lycée de Lavelanet et n'a plus du tout d'attache au Gabon.

Le 5 mai, le juge de la liberté et de la détention (JLD) décide de la prolongation de sa rétention (Article L742-3 CESEDA) permettant ainsi à l'administration d'organiser un nouvel 'éloignement'.

C'est le 27 mai qu'aura lieu cet 'éloignement' mais cette fois avec des techniques coercitives musclées (GTPI). Monté de force dans l'avion, Gidéon sera ligoté et molesté jusqu'au moment où le commandant de bord exigera son débarquement.

Mais s'opposer à son expulsion est un délit. Gidéon passera le soir même devant le procureur en CRPC (Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité) et sera puni d'une peine de prison de 3 mois avec sursis et 5 ans de mise à l'épreuve.

A 100 km de Toulouse, la préfète de l'Ariège reste inflexible : Gidéon doit rester enfermé pour être expulsé.

Le 2 juin, la juge JLD rendra un avis légèrement plus conciliant en lui permettant de rejoindre famille mais en l'obligeant à signer tous les jours au commissariat.

La préfecture de l'Ariège n'a pas apprécié cette décision. Elle a fait appel et l'audience aura lieu ce mardi 7 juin à 9h45 au palais de justice de Toulouse.

Si vous venez à cette audience, vous ne verrez pas le ou la signataire de cet appel. Il ou elle se fera représenter par un ou une porte-parole bien obéissant.e.

On sait qu'un nouveau vol a été demandé par la préfecture et si Gidéon le refuse, il risque cette fois 3 ans d’emprisonnement et une interdiction du territoire de 10 ans.

Depuis ses 18 ans, Gidéon vit sous la menace d'une arrestation, d'une expulsion !

Ce 6 juin, c'est son anniversaire. Il a 19 ans.

 

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