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Le Cercle des Voisins

Informe de l'atteinte à la dignité et aux droits humains que représente l’existence et le fonctionnement du «Centre de Rétention Administrative de Cornebarrieu», défend la libre circulation des personnes et dénonce le système mis en place pour l’expulsion des personnes privées de papiers.

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Fermez les Centres de Rétention !

La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

Solidarite avec Mimmo Lucano

Fortress Europe | 16 Mai 2011

« Un kalachnikovs nous visait, nous ne pouvions pas poser de questions. Nous avons grimpé dans le conteneur, sans même savoir où nous étions transportés. » Arrêtés dans les quartiers africains de Tripoli par les soldats de Kadhafi et obligés par la force à s’embarquer à destination de Lampedusa. Le billet est gratuit, cadeau du régime. C’est autre chose qu’un voyage vers l'espoir, les traversés de la Méditerranée ressemblent de plus en plus à une véritable déportation en masse des Africains de la Libye. Organisée de manière systématique par les forces armées de la dictature.

Un système désormais rodé et qui a déjà réussi à expulser vers l’Italie 14.000 personnes en trois mois. L'idée est simple: utiliser le corps des hommes, des femmes et des enfants en guise de représailles évidente contre les bombardements en Libye. Avec un détail effrayant qui en explique beaucoup de choses sur les relations entre l'Italie et la Libye. Les camions utilisés lors des rafles sont ceux que l'Italie a donné au Colonel à l'époque des reconduites à la frontière.On les utilisait auparavant pour déporter en plein désert les Africains rejetés en mer. Aujourd'hui, on a seulement inversé le sens du voyage. Et plutôt que de les déporter dans le Sahara, on les déporte en Italie.

Kingsley fait partie de la communauté camerounaise de Misratah. Il a vécu le siège, il est resté des semaines bloqué dans un quartier qui était le théâtre d’horribles conflits entre les soldats et les rebelles. Chaque nuit on tirait, et quand ils ne combattaient pas c’était encore pire. Car les militaires ivres montaient chercher nos femmes. Kingsley n’avait jamais pensé à l'Italie. Il voulait juste s’en tirer avec sa famille. Mais il avait choisi l'Egypte comme la terre de la sécurité. Il avait essayé deux fois. Mais il avait toujours été rejeté par les militaires de Kadhafi. Les mêmes qui dans la nuit du 26 mars ont organisé la rafle des Africains de Misratah.

“Nous avons été parmi les premiers à avoir été prélevé de nos maisons. Au début, nous n’étions pas nombreux dans le camion. Puis, peu à la fois, d'autres personnes sont montés. Finalement nous étions au moins deux cents. Enfermés dans l'obscurité. Coincés debout, l’un contre l'autre. Il faisait chaud, ça puait et les enfants pleuraient.”

Cette nuit-là, un convoi complet a quitté la ville. Kingsley a pu compter le nombre de camions lors d'une escale dans le désert. Trois camions porte-conteneurs escortés par trois militaires et trois jeeps blindées avec une grosse antenne pour les communications radio et les drapeaux verts de Kadhafi dans le vent. Au moins cinq cents personnes, toutes prélevées par la force de leurs foyers. En cours de route, le convoi s’est agrandi. Deux camions ont été ajoutés à Tripoli et le troisième à Sabrata. Alors, une fois arrivé à destination finale, Kingsley a compté six camions. Au moins 900 personnes qui ont été faites descendre rapidement des conteneurs et enfermées dans une zone contrôlée par les militaires.

"Nous y sommes restés un mois et cinq jours. C'était une vieille maison en ruine, en dehors de la ville de Zuwara. Et il y avait des militaires partout. Ils avaient de petites bandes vertes sur le bras, ils étaient soldats de Kadhafi. J’en suis sûr. À l'intérieur, nous étions environ 1500 et il y avait beaucoup d'enfants. Je ne te dis pas la saleté! Chaque jour de nouveaux camions arrivaient et d’autres partaient. Et là, nous avons réalisé que nous serions parties en Italie. Un jour, ils nous ont emmenés au port de Zuwara, la nuit. Mais nous avons dû attendre l'aube pour partir, parce qu'il y avait des avions de l'OTAN qui survolaient la ville. Et les militaires nous avaient ordonné de nous cacher. Le lendemain, nous étions divisés: 320 sur un bateau et 280 sur l'autre. Nous avions peur de mourir en mer, mais nous n'avions pas le choix, des fusils nous visaient. "

C’était le 27 avril. Vingt-quatre heures plus tard, du port de Janzour à Tripoli, un troisième navire est parti avec 350 passagers. Parmi eux, Ruby, un Ghanéen de Tripoli, sa femme et son enfant de 13 mois.

"Nous ne voulions pas venir en Europe. Je suis terrifié par la mer. On y a été envoyé par la force. Ils étaient militaires de Kadhafi, vous les reconnaissez au drapeau vert, j'en suis sûr. C’était très dangereux, ils étaient armés, ils sont arrivés à la maison et nous ont forcés à monter dans un camion. À l’intérieur d'un conteneur, comme ceux des cargos. "

Le port de Janzour est situé dans la banlieue ouest de Tripoli. Et avec le nouveau port de Zuwara c’est l'un des principaux ports utilisés par le régime libyen dans l’ opération débarquements. Et comme à Zouara, même à Janzour il y a un camp où les Africains qui seront déportés en Italie sont détenus et contrôlés par les militaires.













 

Lazhar y est resté deux semaines et trois jours. Il est Ivoirien et habitait à Misrata avec sa femme et son fils de trois ans. Les trois ont réussi à s'échapper de la ville assiégée le 6 avril, en payant un chauffeur libyen qui les a conduits jusqu’à la ville historique de Tripoli, l'ancienne Madina. De là, quelques jours plus tard, ils ont pris un taxi pour l'aéroport, d'où on leur avait dit y avoir des bus directs à la frontière tunisienne pour évacuer les personnes déplacées. Le chauffeur, cependant, sans rien leur dire, les a conduits directement à Janzour.

"Le campement est à proximité du port. On l’appelle Sab'atash, ou campement 17. J'ai eu une discussion avec le chauffeur, je voulais aller à l'aéroport, mais il n'y avait aucun moyen de le raisonner. Je n'avais aucune intention de venir en Europe. Car pour venir en Europe il faut d’abord un visa sur le passeport, on n’y entre pas comme ça! Je n'y avais vraiment jamais pensé de ma vie. Tout ce que j'avais en tête était de bien travailler et d'envoyer mon fils à l'école pour qu’il fasse des études. Mais finalement nous avons dû faire ce que les militaires disaient. Puis nous sommes entrés dans le campement et à l'intérieur nous avons trouvé des centaines de personnes amenées de toute la Libye."

Son bateau est parti le 27 avril, à cinq heures du matin avec 503 personnes à bord. Avant de partir, les militaires au port lui ont dit en plaisantant que l’ordre avait été donné par Kadhafi que tous les Africains devaient désormais aller en Italie. Et sans payer. Et en effet Lazhar, sa femme et son enfant n'ont pas payé un centime. Ainsi la famille Kingsley et de Ruby. Un dernier geste de magnanimité du colonel. Pour mourir en mer, c’est le régime qui offre.

traduit par Veronic Algeri





 


 

Vite dit

06/06/2022 - Archarnement administratif, ca suffit !

« Comment peut-on croire qu'on sera plus heureux en faisant du mal à d'autres ? » (Hervé le Tellier – L'anomalie)

Ce mardi 7 juin 2022, Gideon est convoqué au tribunal judiciaire de Toulouse. Combien de juges a-t-il vu depuis le jour où il a été interpellé au commissariat de Pamiers ?

Au moins 7.

Le 3 mai, ce jeune gabonais de 18 ans, a été placé au centre de rétention de Cornebarrieu pour un vol prévu le 4 mai vers Libreville. Ce placement rendu possible par la loi (Article L 740-1 CESEDA) a été concrétisé par la préfecture de l'Ariège.

Il a refusé d'embarquer car toute sa famille vit en France de manière régulière. Il est scolarisé au lycée de Lavelanet et n'a plus du tout d'attache au Gabon.

Le 5 mai, le juge de la liberté et de la détention (JLD) décide de la prolongation de sa rétention (Article L742-3 CESEDA) permettant ainsi à l'administration d'organiser un nouvel 'éloignement'.

C'est le 27 mai qu'aura lieu cet 'éloignement' mais cette fois avec des techniques coercitives musclées (GTPI). Monté de force dans l'avion, Gidéon sera ligoté et molesté jusqu'au moment où le commandant de bord exigera son débarquement.

Mais s'opposer à son expulsion est un délit. Gidéon passera le soir même devant le procureur en CRPC (Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité) et sera puni d'une peine de prison de 3 mois avec sursis et 5 ans de mise à l'épreuve.

A 100 km de Toulouse, la préfète de l'Ariège reste inflexible : Gidéon doit rester enfermé pour être expulsé.

Le 2 juin, la juge JLD rendra un avis légèrement plus conciliant en lui permettant de rejoindre famille mais en l'obligeant à signer tous les jours au commissariat.

La préfecture de l'Ariège n'a pas apprécié cette décision. Elle a fait appel et l'audience aura lieu ce mardi 7 juin à 9h45 au palais de justice de Toulouse.

Si vous venez à cette audience, vous ne verrez pas le ou la signataire de cet appel. Il ou elle se fera représenter par un ou une porte-parole bien obéissant.e.

On sait qu'un nouveau vol a été demandé par la préfecture et si Gidéon le refuse, il risque cette fois 3 ans d’emprisonnement et une interdiction du territoire de 10 ans.

Depuis ses 18 ans, Gidéon vit sous la menace d'une arrestation, d'une expulsion !

Ce 6 juin, c'est son anniversaire. Il a 19 ans.

 

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