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Le Cercle des Voisins

Informe de l'atteinte à la dignité et aux droits humains que représente l’existence et le fonctionnement du «Centre de Rétention Administrative de Cornebarrieu», défend la libre circulation des personnes et dénonce le système mis en place pour l’expulsion des personnes privées de papiers.

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Fermez les Centres de Rétention !

La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

Solidarite avec Mimmo Lucano

L'Obs | 27/06/2015

Entre 2000 et 2014, 40.000 migrants sont morts aux frontières, dont 22.000 en tentant de rejoindre l’Europe, qui est aujourd’hui devenue, pour eux, la destination la plus dangereuse au monde. Pour la seule année 2014, plus de 3500 sont morts noyés en Méditerranée.

Le décompte macabre continue chaque jour. Et les survivants sont bloqués aux frontières externes mais aussi internes de l’Europe (comme ces derniers jours entre l’Italie et la France), multipliant les situations de mise à l’écart, de violence et d’humiliation. Cela au nom d’une raison d’Etats européens qui disent répondre aux peurs et aux demandes des habitants pour plus de sécurité, de contention et d’imperméabilité.

Et pourtant, nous affirmons qu’il serait plus rationnel, plus juste, plus sûr, d’ouvrir les frontières. A l’opposé de l’idée trop répandue dans les médias et les discours politiques, cette proposition n’a rien d’un fantasme naïf et irréaliste. Au contraire : c’est l’ouverture des frontières qui permettrait enfin de sortir d’un engrenage de violences qui a déjà fait des milliers de morts parmi les migrants, et de dessiner un horizon pour un véritable projet politique européen en matière d’asile et d’immigration.

Voici dix raisons pour lesquelles il faut ouvrir les frontières.

Notre premier argument est de bon sens. Le fait migratoire est un fait social, une réalité du monde contemporain, auquel il est absurde de vouloir résister. Vouloir empêcher les migrations est aussi vain que de vouloir empêcher la nuit de succéder au jour. Les gens ne choisissent pas de migrer ou de rester parce qu’une frontière est ouverte ou fermée.

L’idée que la fermeture des frontières puisse limiter les flux migratoires est irréaliste et criminelle, et méconnaît complètement la réalité des migrations. Elle ne fait que rendre les déplacements plus précaires, plus coûteux et plus dangereux, transformant la Méditerranée en charnier. Ouvrir les frontières, c’est avant tout permettre aux gens de migrer dans des conditions sûres et dignes, c’est mettre un terme à la tragédie qui se joue aux frontières de l’Europe.

Ouvrir les frontières, légaliser les mobilités de tous, c’est tuer dans l’oeuf le business de ceux qui ont fait profession du trafic de cargaisons humaines, en profi tant, de plus en plus et de manière de plus en plus dangereuse, d’une économie de la prohibition. Ouvrir les frontières, c’est la manière la plus efficace de lutter contre les passeurs. C’est permettre aux migrants d’arriver en avion plutôt qu’en bateau.

Aucune enquête n’a prouvé la véracité des «appels d’air» ou des «invasions» tant annoncés et fantasmés. La construction du mur entre le Mexique et les Etats-Unis n’a nullement ralenti les flux migratoires entre les deux pays, pas plus que l’ouverture de la frontière entre l’Inde et le Népal n’a provoqué d’afflux massifs de migrants, comme l’ouverture des frontières au sein de l’Europe de Schengen.

Ni l’opération de sauvetage Mare Nostrum, menée par l’Italie en 2014, ni les régularisations de migrants en situation irrégulière (600.000 en Espagne en 2005, 500.000 en Italie en 2006, près de cinq millions aux Etats-Unis en 2014, etc.) n’ont jamais provoqué d’augmentation soudaine et significative de la migration «clandestine». Elles ont juste permis de commencer à réconcilier les migrants avec leurs sociétés de départ et de destination.

Argument paradoxal, et pourtant : ouvrir la frontière, c’est certes laisser entrer le migrant, mais c’est aussi lui permettre de repartir sans inquiétude. Beaucoup de migrants sont aujourd’hui coincés dans leur pays de destination, par peur de ne plus pouvoir y revenir ensuite si jamais ils en sortaient.Ouvrir les frontières rendrait la mobilité plus fluide, et permettrait à des milliers de migrants de rentrer au pays voir une famille qu’ils n’ont parfois pas revue depuis plusieurs années.

Toutes les études montrent que la contribution économique des migrants à leur pays de destination est d’autant plus positive que leur situation y est sûre et légale. Rendre toutes les migrations légales ferait de facto disparaître l’immigration «clandestine», et permettrait aux migrants de déployer leur plein potentiel économique dans le pays d’accueil.

Leur contribution économique est aussi dirigée vers leur pays d’origine: les transferts financiers des migrants vers leurs familles représentent trois fois le montant de l’aide officielle au développement versé par les pays industrialisés. Il est absurde de lier l’aide au développement au contrôle des migrations puisque au contraire, c’est la mobilité qui est un facteur potentiellement puissant de développement.

L’embauche des travailleurs étrangers en situation irrégulière dans les pays riches est un «dumping social», l’équivalent d’une «délocalisation sur place»: les pires conditions sociales sont imposées à des travailleurs sans droits. La légalisation des migrants leur donnerait accès aux mêmes droits et aux mêmes rémunérations que les autres salariés.

Elle rendrait visible leur participation à l’économie du pays d’accueil, notamment par leur contribution – et celle de leurs employeurs – aux prestations sociales. Par nature, la migration «illégale» n’existe plus avec des frontières ouvertes. Les situations de précarité administrative disparaissent et les conditions de travail s’améliorent et s’harmonisent.

Le droit de quitter son pays est inscrit dans la Déclaration universelle des Droits de l’Homme. C’est une question de liberté et d’égalité. Le destin des uns et des autres est déterminé par l’endroit où ils/elles sont né/e/s. C’est la fermeture des frontières qui crée le privilège du lieu de naissance, cette inégalité insupportable. L’ouverture des frontières reconnaît la légitimité de toute migration, et le droit à la mobilité de chacun.

Il faut le répéter : ouvrir les frontières, ce n’est pas supprimer les frontières. Soyons légalistes : le fait d’autoriser les libres circulations permettrait de mieux les accompagner, de savoir où vont les migrants et dans quelles conditions. C’est s’assurer que les migrations se déroulent dans les meilleures conditions possibles pour tous, et que ceux qui ont besoin d’être protégés le soient effectivement.

Des voisins solidaires et mobilisés, un tissu associatif dense capable d’organiser l’accueil des étrangers et aider leur insertion, des villes qui créent de meilleures conditions de logement en centres d’accueil pour les errants : telles sont les formes d’une hospitalité sans condition qui existent déjà dans la société et qu’un gouvernement aurait la possibilité de mobiliser et d’aider, à l’opposé de la guerre aux migrants qui forme aujourd’hui le régime officiel de pensée et d’action.

Dans les années 1930, les juifs ou les exilés espagnols étaient devenus des «indésirables». Aujourd’hui, face au retour de l’idée qu’une partie des humains sont indésirables, nous avons le choix de réaffirmer l’unité de l’Homme et traduire cette idée en politique. Contre l’obscurantisme, il s’agit simplement de relancer l’humanisme.

Michel Agier et François Gemenne

MICHEL AGIER est anthropologue, directeur de recherche à l’Institut de Recherche pour le Développement et directeur d’études à l’EHESS. Il a publié, aux Editions La Découverte, «la Condition cosmopolite» (2013) et «Un monde de camps» (sous sa direction, 2014).

FRANÇOIS GEMENNE est politologue, enseignant aux universités de Liège et de Versailles-Saint-Quentin, directeur exécutif du programme Politiques de la Terre à Sciences-Po. Il va publier, en 2016, «Vive l’immigration», aux Editions La Découverte.

Vite dit

06/06/2022 - Archarnement administratif, ca suffit !

« Comment peut-on croire qu'on sera plus heureux en faisant du mal à d'autres ? » (Hervé le Tellier – L'anomalie)

Ce mardi 7 juin 2022, Gideon est convoqué au tribunal judiciaire de Toulouse. Combien de juges a-t-il vu depuis le jour où il a été interpellé au commissariat de Pamiers ?

Au moins 7.

Le 3 mai, ce jeune gabonais de 18 ans, a été placé au centre de rétention de Cornebarrieu pour un vol prévu le 4 mai vers Libreville. Ce placement rendu possible par la loi (Article L 740-1 CESEDA) a été concrétisé par la préfecture de l'Ariège.

Il a refusé d'embarquer car toute sa famille vit en France de manière régulière. Il est scolarisé au lycée de Lavelanet et n'a plus du tout d'attache au Gabon.

Le 5 mai, le juge de la liberté et de la détention (JLD) décide de la prolongation de sa rétention (Article L742-3 CESEDA) permettant ainsi à l'administration d'organiser un nouvel 'éloignement'.

C'est le 27 mai qu'aura lieu cet 'éloignement' mais cette fois avec des techniques coercitives musclées (GTPI). Monté de force dans l'avion, Gidéon sera ligoté et molesté jusqu'au moment où le commandant de bord exigera son débarquement.

Mais s'opposer à son expulsion est un délit. Gidéon passera le soir même devant le procureur en CRPC (Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité) et sera puni d'une peine de prison de 3 mois avec sursis et 5 ans de mise à l'épreuve.

A 100 km de Toulouse, la préfète de l'Ariège reste inflexible : Gidéon doit rester enfermé pour être expulsé.

Le 2 juin, la juge JLD rendra un avis légèrement plus conciliant en lui permettant de rejoindre famille mais en l'obligeant à signer tous les jours au commissariat.

La préfecture de l'Ariège n'a pas apprécié cette décision. Elle a fait appel et l'audience aura lieu ce mardi 7 juin à 9h45 au palais de justice de Toulouse.

Si vous venez à cette audience, vous ne verrez pas le ou la signataire de cet appel. Il ou elle se fera représenter par un ou une porte-parole bien obéissant.e.

On sait qu'un nouveau vol a été demandé par la préfecture et si Gidéon le refuse, il risque cette fois 3 ans d’emprisonnement et une interdiction du territoire de 10 ans.

Depuis ses 18 ans, Gidéon vit sous la menace d'une arrestation, d'une expulsion !

Ce 6 juin, c'est son anniversaire. Il a 19 ans.

 

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