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Fermez les Centres de Rétention !

La secrétaire générale de La Cimade dénonce : les enfermements arbitraires, les violences et les mises à l’isolement répétées, un climat de stigmatisation grandissante, les expulsions illégales

Solidarite avec Mimmo Lucano

Source : Médecins du Monde - Lisa Vera

La Calabre, l’une des régions les plus pauvres d’Europe est aujourd’hui l’un des principaux lieux d’arrivée en Europe pour des milliers de personnes qui fuient l’horreur de la guerre ou la misère. Parmi eux des jeunes sans famille, traumatisés par l’exil et rescapés des dangers de la Méditerranée, que Médecins du Monde aide à se reconstruire

Depuis le 1er janvier 2017, un millier de mineurs non accompagnés sont arrivés sur les côtes de ce territoire situé à l’extrême sud-ouest de l’Italie. Systématiquement pris en charge par les autorités italiennes et mis à l’abri, ces jeunes, extrêmement vulnérables, peuvent enfin souffler après un chemin douloureux. Alpha, un jeune Guinéen de 17 ans, vit en Calabre depuis maintenant près d’un an. Parti de son pays à cause d’un conflit ethnique, il a parcouru plus de 7 000 kilomètres. Comme la grande majorité des migrants africains, il est passé par la Libye. Une étape particulièrement traumatisante. « On m’a emprisonné pendant des mois, raconte-t-il, je ne sais même pas de quel crime on m’accusait. Je voyageais avec mon frère. Des hommes armés l’ont attrapé et l’ont tué, juste devant mes yeux. » À son arrivée en Italie, Alpha est choqué, incapable de parler. Placé dans le centre de premier accueil de Melito, géré par la coopérative Exodus, il rencontre Giusi Malaspina, sa responsable, qui recueille les enfants et met un point d’honneur à les aider à surmonter leur traumatisme pour pouvoir envisager leur avenir.

LIBÉRER LA PAROLE

Les équipes de Médecins du Monde sont également présentes dans le centre. À raison d’une permanence par semaine, elles proposent à la centaine de jeunes qui y sont hébergés des activités psychosociales. Un temps d’écoute pour libérer la parole et permettre aux frustrations et aux difficultés rencontrées dans un nouvel environnement de s’exprimer. Yodit et Francesca, travailleuses sociales, amènent notamment ces mineurs à réfléchir aux questions qu’ils voudraient poser aux Italiens qu’ils côtoient au quotidien. Ceux-ci s’interrogent tout particulièrement sur les différences qui semblent les opposer. Car cette cohabitation récente n’est pas toujours simple. Notamment dans les villages très reculés, où les autorités calabraises ont ouvert des centres de premier accueil pour faire face à l’urgence.

Alberto Polito est psychologue pour Médecins du Monde. Dans la vingtaine de centres où les équipes interviennent, il mène régulièrement des ateliers d’horticulture. Une activité a priori très éloignée d’un acte médical. Pourtant, en encourageant ces jeunes à planter des piments pour que leurs rêves et leurs espoirs grandissent avec ces plantes qui mettront deux semaines à pousser, il les aide à se reconstruire. « Une fois arrivés en Europe, ces mineurs pensent que tout est fini et qu’ils pourront enfin réaliser leurs rêves. Au bout de quelques jours, ils réalisent tout d’abord l’extrême violence de leur parcours puis entrevoient toutes les difficultés qu’ils devront affronter, pour se faire une place en Europe. Obtenir des papiers, pouvoir aller à l’école ou encore rencontrer une petite amie », explique-t-il.

CONTINUER À GRANDIR

Dans l’atelier « les héros de l’Afrique », ces jeunes sont invités à identifier de grandes figures de la culture africaine. Yodit et Francesca leur présentent des portraits accompagnés de célèbres citations. Le Nigérian Fela Kuti, le Ghanéen Kofi Annan ou encore l’Ivoirien Alpha Blondy sont quelques unes de ces personnalités respectées. Malik, Sénégalais de 17 ans, reconnaît immédiatement le chanteur Youssou N’Dour : « Il a rendu la fierté à notre pays et nous a fait connaître dans le monde entier. »

Réussir à se faire une place, à trouver sa voie tout en préservant le lien avec ses racines, est un enjeu capital pour ces jeunes qui ont dû grandir trop vite et quitter leur famille pour survivre. Alpha espère avoir trouvé ici, en Calabre, une terre d’accueil où il pourra continuer de grandir. Grâce à la détermination de Giusi de la coopérative Exodus, il peut désormais aller à l’école et apprendre un métier. Aujourd’hui, malgré les discriminations raciales, il se reconstruit peu à peu. « Je rêve d’être un homme reconnu pour montrer aux autres personnes que nous sommes tous égaux et que les mineurs ont droit à un futur. »

L’Italie lui a donné une chance. En France, en l’absence de mesures d’accueil dignes et avec les carences du système de protection de l’enfance, Alpha n’aurait vraisemblablement pas bénéficié des mêmes opportunités. Nombre de jeunes isolés n’ont d’autre choix que de dormir dehors, sans aucune prise en charge adaptée. Pour que chacun de ces enfants puissent accéder à la vie à laquelle il aspire, il est désormais urgent que soit mise en place, partout en Europe, une vraie politique d’accueil, solidaire et humaine.

Lisa Véra                     

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